Un jour, ils se sont réveillés, émerveillés, ils ne comprirent rien, il ne faisait ni jour ni nuit, ni chaud ni froid, il n’y avait aucun bruit mais un vacarme intérieur assourdissait leur ouïe, ils étaient tous là, réunis, dans un endroit caverneux, en plein air sans qu’il n’arrivent à percevoir le ciel, ils ne se voyaient pas, ne s’entendaient pas, ne sentaient pas, ils se croyaient morts, mais ils pensaient, donc ils existaient. Soudain une question résonna en eux, qu’est ce que ? …Qu’est ce que quoi ? Qui ? …Mais qui est quoi ? Qui est qui ? ...C’était ahurissant, ils étaient pensifs, ils en avaient l’air, mais ne pensaient pas, en chacun d’eux s’arrêta la réflexion, aucune continuité, même pas une idée… Qu’est ce qui se passe? Qui sont ils ? Des êtres ou pas des êtres, tel est la question.
L’un d’eux se souvint, il avait un nom, on l’appelait et il se reconnaissait, mais là il ne peut pas entendre même si on l’appelle, il n’entend même pas le calme absolu, est-ce un sens qui lui manque? Il se retourna vers son voisin et voulu lui demander, il a voulu parler.., avant il parlait bien!! , du moins c’est ce qu’il pense, mais rien, il ne savait pas comment faire, il y avait un mécanisme qui sortait les mots qu’il pensait, parfois même ceux qu’il ne pensait pas, il se rappela qu’il y avait des sourds, Ah oui, seigneur !! Ils parlaient avec les mains, est ce que mon voisin me comprendrait se disait-il, avant de se rendre compte qu’il ne sait pas comment générer ces signes, il a complètement oublié ce qu’il fallait faire pour donner ces signes, mais pour sortir ces signes il fallait bouger quelque chose, ah oui !! il se rappelle, il s’agit de ses mains, mais … qu’est ce qui se passe, où est mon corps s’écria-t-il en silence, plus de mains, plus de tête, plus de torse, cette situation n’a ni queue ni tête, il voulut palper le bas du ventre, un instinct de survie lui rappela son instrument de reproduction, « où est ce qu’il est je n’en ai plus, je ne suis plus, là je pense mais je ne suis pas ! » ; il philosophait, catastrophait... Sans réponses. Il faut réfléchir, il n’a pas le choix c’est la seule chose qui lui reste, où est ce qu’il est ? Nulle part !! Dans un trou noir ? Dans le coma peut-être, c’est une bonne idée le coma, pourquoi pas, malgré le chagrin qu’il ressent, il est soulagé de s’être situé un peu, il était entrain de développer cette théorie, quand vient interférer, une idée, mais elle n’était pas sienne, une pensée qui ne lui appartient pas, est ce que c’est son subconscient ? Mais il ne l’a jamais senti avant !! Une autre idée clarifiait que ce n’est pas le subconscient, en embrouillant complètement ses pensées, ça lui rappelle un rond-point où les voitures s’entremêlent, ou peut-être les ondes de deux radios qui s’interfèrent, c’était celles d’une autre personne, elle pense comme lui exactement comme lui, elle est perdue, inconnue pour elle-même, est ce qu’il est schizophrène ? Un schizo comateux ? Ce n’est pas possible, il sentit la féminité des pensées étrangères, il sentait sa virilité à lui, un schizo garde pourtant son sexe, « suis-je hermaphrodite ? » se demanda-t-il. Quand soudain vient une vague, un tsunami de pensées, il les a sentis pénétrer les siens et a senti les siens lui échapper, puis rien, plus aucune pensée, la dernière chose qui lui est restée s’est volatilisée, il n’est plus lui, il fait encore partie de se monde mais sent un altruisme démesuré, il sent un sens du partage monstre, il a peur, mais il a senti le même sentiment chez les autres, il pouvait tout déchiffrer, lire dans les pensées de tous ses semblables, personne ne lui voulait de mal, il sentait un groupe, la force d’un groupe, la grandeur des idées sous-jacentes à cette fusion de pensées, il pensait en grand, il s’est compris, il a tout compris, ses amis aussi, oui désormais ce sont ses amis, et même une partie de lui, il commence à participer, il a rejoint ceux qui veulent parler, il a commandé et il entend des mots sortir comme il les a pensé lui et ses amis, il a voulu voire il a rejoint le groupe de la vue et a vu la beauté du monde dans lequel il existait bien, il a voulu toucher, penser encore plus, faire l’amour, avoir plaisir, sauter, marcher, danser, embrasser, rire, pleurer, il a pu conjuguer tous les verbes vocables et non vocables, il a réussi, il a remercié ses amis, qui l’ont remercié à leur tour. Ils se sont tous concentrés, pour savoir ce qui s’était passé. C’est là qu’ils comprirent qu’ils étaient des neurones et qu’ils faisaient partir du cerveau d’un homme, qui vient de se réveiller après une nuit de rêves et de cauchemars étranges, ils se sont séparés lors du sommeil, ont perdu leur ordre et n’en ont fait qu’à leur tête, avant de se perdre, d’avoir peur et de se réunir à nouveau, sous l’effet du bruit assourdissant de l’alarme du radio-réveil.
Et notre éveil à nous ? C’est pour quand ? Est-ce que nous nous réveillerons, sous le bruit assourdissant d’une bombe à Hydrogène ou sous les chuchotements et caresses de notre bonne volonté et conscience?